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Tariq Ramadan à une conférence sur les violences faites aux femmes

Tariq Ramadan s'est attiré les critiques du public en assistant à une conférence sur la violence envers les femmes (archives). KEYSTONE/SALVATORE DI NOLFI sda-ats

(Keystone-ATS) La présence de l’islamologue genevois Tariq Ramadan dans le public d’une conférence contre les violences faites aux femmes a suscité l’indignation lundi à Saint-Denis. Coïncidence du calendrier, la Cour d’appel de Paris a maintenu mardi les mises en examen pour viol.

Quelque 70 personnes assistaient à cette réunion publique organisée lundi soir à la mairie sur le thème “lutter contre les violences envers les femmes au quotidien”. Parmi elles se trouvait Tariq Ramadan, mis en examen pour viols, qui est domicilié à Saint-Denis, au nord de Paris, depuis sa libération conditionnelle mi-novembre. La municipalité a condamné une “provocation inacceptable”.

“Il lui a été dit à plusieurs reprises que sa présence n’était pas souhaitée”, a expliqué Madjid Messaoudene, conseiller municipal en charge notamment de l’égalité femme-homme et de la lutte contre les discriminations. Face à son refus de quitter la salle, plusieurs personnes ont décidé de partir.

Provocation

“Sa venue dans la salle comme spectateur du débat est une provocation inacceptable”, a dénoncé la municipalité (PCF) mardi dans un communiqué. “Ni la municipalité ni les participant.e.s n’avaient invité monsieur Ramadan à venir ni même souhaité sa présence”, a-t-elle ajouté, rappelant qu’il n’est cependant “pas possible de faire sortir par la contrainte physique un participant à une réunion publique”.

“Ses provocations ignobles doivent s’arrêter”, a encore dit la mairie, appelant l’intellectuel suisse à “respecter un minimum de décence en laissant en paix celles et ceux qui se battent contre les violences faites aux femmes”. Parmi les intervenantes invitées à débattre figuraient la député LFI Danièle Obono et la politologue Françoise Vergès.

L’intellectuel musulman, 56 ans, est mis en examen depuis le 2 février 2018 pour deux viols en France. En Suisse, quatre plaintes ont été déposées par des femmes. Longtemps considéré comme une figure influente de l’islam européen, Tariq Ramadan a été remis en liberté mi-novembre, sous contrôle judiciaire.

Mise en examen maintenue

Le Genevois espérait le retrait de ces mises en examen. Mais mardi, la cour d’appel de Paris les a maintenues, en pointant la volonté de l’islamologue de “dissimuler la réalité” de ses relations avec ses accusatrices.

“Les messages échangés (avec ses victimes présumées), qui devront faire l’objet d’investigations supplémentaires, (…) ne font pas disparaître les indices graves ou concordants rendant vraisemblable que Tariq Ramadan ait pu participer à la commission des faits de viols”, écrivent les magistrats de la chambre de l’instruction dans leur arrêt rendu jeudi et dont l’AFP a eu connaissance mardi.

Pour justifier sa décision, la chambre de l’instruction cite également les “déclarations constantes et réitérées” des plaignantes d’avoir subi des actes sexuels forcés et violents. Les “dénégations réitérées antérieures” de Tariq Ramadan, jusqu’à sa volte-face en octobre, font en revanche douter les magistrats de sa sincérité et, selon eux, “traduisent une volonté de dissimuler la réalité de son comportement” avec les plaignantes.

Les magistrats invoquent aussi les “déclarations concordantes” de quatre témoins “indiquant qu’une des victimes présumées leur avait décrit un viol” et décrivant une scène correspondante au récit de la plaignante, ainsi que le témoignage d’une confidente de l’autre victime présumée, qui lui avait conseillé de porter plainte peu après les faits.

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