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Quantifier l’absorption de molécules odorantes par les poissons

L'intérieur du cube, appelé TransFEr, abrite deux compartiments séparés par une membrane constituée à partir d'une lignée de cellules intestinales qui reproduit la paroi intestinale des poissons. Eawag/Schug et al. sda-ats

(Keystone-ATS) Des chercheurs de l’Eawag ont mis au point un petit boîtier simulant l’absorption par les poissons des molécules odorantes provenant des parfums, par exemple, et qui se retrouvent dans le milieu aquatique. Cela pourrait contribuer à réduire les tests sur les animaux.

De très nombreux produits d’usage courant contiennent des substances aromatiques et odorantes: cosmétiques, lessives et détergents, parfums d’ambiance, entre autres. Si ces composés ne sont pas ou pas totalement éliminés dans les stations d’épuration, ils se retrouvent tôt ou tard dans les lacs, les rivières et les eaux souterraines.

Les fabricants qui désirent les utiliser sont donc contraints d’évaluer les risques qu’ils représentent pour l’environnement avant de pouvoir les intégrer à leurs produits, a indiqué jeudi l’Institut fédéral de recherche sur l’eau Eawag dans un communiqué.

L’un des principaux paramètres qu’ils doivent considérer est la capacité d’accumulation dans les poissons. Il se trouve cependant que ces substances sont très difficiles à tester: beaucoup se fixent facilement sur les matériaux et sont volatiles pour pouvoir être perçues par l’odorat.

Membrane de cellules intestinales

“En raison de ces propriétés, les molécules odorantes sont progressivement perdues au cours des tests”, indique la biologiste Hannah Schug, de l’Eawag, citée dans le communiqué. Pour pallier ces difficultés, elle a travaillé à un nouveau dispositif pour évaluer les substances odorantes en collaboration avec l’un des principaux fabricants du marché.

L’appareil, de la taille d’un petit Rubik’s cube, est hermétique pour que les substances ne puissent pas se volatiliser et présente une surface intérieure absolument lisse, si bien que les composés qui y pénètrent ne peuvent pas adhérer à ses parois.

L’intérieur du cube, appelé TransFEr, abrite deux compartiments séparés par une membrane constituée à partir d’une lignée de cellules intestinales qui reproduit la paroi intestinale des poissons, voie privilégiée de pénétration de très nombreuses substances dans l’organisme.

La substance à tester est introduite dans le compartiment supérieur, et une mesure est ensuite effectuée dans le compartiment inférieur pour savoir combien de molécules ont traversé les cellules intestinales.

Les valeurs obtenues indiquent l’intensité avec laquelle les poissons absorbent les substances testées par l’intestin et sont donc susceptibles de les accumuler dans leur organisme.

Recherche pharmaceutique

Au-delà de la toxicologie environnementale, l’appareil pourrait être intéressant pour de nombreux domaines de recherche, comme la toxicologie humaine et la pharmacologie.

Les sociétés pharmaceutiques utilisent déjà des lignées cellulaires humaines pour évaluer l’absorption des substances actives de médicaments à travers la paroi intestinale. Mais certaines de ces substances présentent des propriétés similaires à celles des parfums et sont donc difficiles à étudier.

“Notre appareil permettrait maintenant de les tester”, indique Mme Schug. Et d’ajouter: “Une fois qu’il a été démontré qu’une substance est incapable de traverser les cellules intestinales humaines dans le système TransFEr, il devient inutile de la tester sur les animaux”.

Ainsi, grâce à ce type d’essais, il devrait bientôt être possible de renoncer, au moins partiellement, à l’expérimentation animale en recherche environnementale et médicale, selon les chercheurs. Ces travaux sont publiés dans la revue Analytical Methods.

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