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Les scientifiques se mobilisent à travers le monde contre les politiques de Trump

La marche s'est dirigée de l'esplanade du National Mall, face à la Maison blanche, en direction du Capitole, siège du Congrès. KEYSTONE/FR171401 AP/SAIT SERKAN GURBUZ sda-ats

(Keystone-ATS) Des milliers de scientifiques ont manifesté samedi aux Etats-Unis pour défendre la recherche scientifique, qu’ils estiment remise en question par l’administration du président Donald Trump. Des marches similaires ont eu lieu dans plus de 500 villes du monde.

Plusieurs dizaines de scientifiques dont Nancy Roman, responsable des programmes d’astronomie de la Nasa, ainsi que des groupes musicaux, se sont succédé pendant plus de cinq heures sur une tribune dressée sur l’esplanade du National Mall face à la Maison Blanche.

Une marche a ensuite commencé vers le Capitole, siège du Congrès, la plupart des manifestants brandissant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire, entre autres: “La Science pas l’idéologie” ou “les faits scientifiques ça compte”. Cette manifestation festive coïncidait avec la Journée mondiale de la Terre.

D’autres rassemblements se déroulaient dans plusieurs autres villes américaines dont New York et Los Angeles. A Berlin, 11’000 personnes – selon les organisateurs – se sont rassemblées, portant des banderoles “Nous aimons les experts, ceux qui ont des preuves”. En France, plusieurs milliers de personnes se sont mobilisées dans une dizaine de villes.

Repli sur soi

A Genève, une marche a rassemblé plusieurs centaines de personnes. Le cortège était composé de gens de tous horizons et de tout âge, parlant de nombreuses langues, avec néanmoins une certaine prépondérance de l’anglais. Parmi les manifestants se trouvait l’ex-directeur général du CERN, le physicien allemand Rolf Heuer.

Comme le reste des marcheurs, il est convaincu que la communauté scientifique doit sortir de son silence face aux dangers qui guettent. La science est le seul moyen pour comprendre la nature et elle ne peut s’épanouir que dans une société ouverte, a déclaré à l’ats M.Heuer. Or, la tendance actuelle est plutôt à un repli sur soi, et ce phénomène concerne aussi l’Europe, a-t-il ajouté.

Trump pour “une science rigoureuse”

Donald Trump a réagi samedi dans un communiqué. “Une science rigoureuse est essentielle aux efforts de mon administration pour accomplir le double objectif de la croissance économique et de la protection environnementale”, affirme-t-il.

“Mon administration est attachée à l’avancement de la recherche scientifique qui permet une meilleure compréhension de notre environnement et des risques environnementaux”, ajoute le texte publié quelques minutes après que la limousine présidentielle eut croisé des manifestants à Washington.

Opinions et croyances idéologiques

Le mouvement a été initié par l’Association américaine pour l’avancement de la science (AAAS), plus grande organisation scientifique généraliste au monde, avec 120’000 membres.

“Les chercheurs réalisent de plus en plus que les faits scientifiques sont trop souvent ignorés dans les débats publics et sont remplacés par des opinions et des croyances idéologiques”, a déploré jeudi le président de l’AAAS, Rush Holt.

Ce phénomène est apparu il y a plusieurs décennies et s’est aggravé récemment, a estimé cet ancien élu démocrate au Congrès. Il a pointé le fait que le budget fédéral de la recherche représentait moins de la moitié de celui des années 1960 en pourcentage du Produit intérieur brut (PIB).

Un “canular”

Parmi les sujets qui inquiètent la communauté scientifique, le projet de Donald Trump de réduire les budgets des agences fédérales intervenant dans le champ scientifique, comme l’Agence de protection de l’environnement (EPA) dont le président américain veut réduire de 31% la dotation financière dans le budget 2018.

Le milliardaire républicain avait lui-même dit pendant sa campagne que le changement climatique était “un canular” et promis de retirer les Etats-Unis de l’accord de Paris sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre, une décision encore débattue parmi ses conseillers.

Plus globalement, les chercheurs américains dénoncent ce qu’ils voient comme un scepticisme croissant dans la classe politique et d’autres catégories de la société à l’égard des sciences qui se manifeste aussi sur des sujets comme les organismes génétiquement modifiés, l’évolution ou les vaccinations.

“C’est vraiment l’éternel débat entre les conceptions rationnelle et irrationnelle de l’univers”, observe Elias Zerhouni, ancien directeur des Instituts nationaux de la santé.

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