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Le Conseil des Etats veut réfléchir avant de s’en prendre aux GAFA

Le Conseil des Etats n'a pas encore tranché sur les rémunérations que pourraient payer les géants du Web lorsqu'ils diffusent des articles journalistiques. Il veut que sa commission approfondisse la question (archives). KEYSTONE/CHRISTIAN BEUTLER sda-ats

(Keystone-ATS) Le Conseil des Etats veut réfléchir avant de faire passer les géants du Web à la caisse concernant l’utilisation de prestations journalistiques. Il a renvoyé mardi la révision du droit d’auteur en commission pour qu’elle se penche encore sur les points controversés.

La commission préparatoire proposait que les exploitants de plates-formes de communication sur Internet versent une rémunération à l’auteur de l’oeuvre journalistique qu’ils mettent à libre disposition. Google, Facebook et consorts garderaient toutefois la possibilité de publier quelques mots sans signification journalistique avec le lien permettant à l’utilisateur d’accéder directement au texte original.

Les éditeurs disposeraient quant à eux pendant dix ans du droit exclusif de rendre accessibles, totalement ou partiellement, leurs produits médiatiques aux fournisseurs commerciaux de services électroniques. Aucune rémunération ne serait versée si l’auteur gère personnellement le droit exclusif à la mise à disposition.

Décision de l’UE attendue

On peut douter que ce concept protège vraiment les journalistes, a estimé Anita Fetz (PS/BS). La question des liens permettant d’accéder aux articles reste controversée. Le problème doit être traité parallèlement aux travaux en cours dans l’Union européenne. Une décision est attendue en mars, a ajouté Géraldine Savary (PS/VD).

Il ne faudrait pas que la Suisse soit isolée sur cette question. D’autant plus que les médias traversent une crise. Pas moins de 80% des recettes publicitaires sont captées par les grands moteurs de recherches, a rappelé la Vaudoise.

Vu l’importance de la révision du droit d’auteur, il faut agir avec précaution, selon Pirmin Bischof (PDC/SO), à l’origine de la proposition de renvoi. Le projet vise à adapter les droits des artistes et la lutte contre le piratage à l’ère d’Internet.

Il faut éviter que le consensus issu des propositions d’un groupe de travail ne s’étiole. L’évolution actuelle du droit européen doit être prise en compte, selon le Soleurois. Même au niveau européen, le question du droit d’auteur est sujette à controverses, a nuancé la conseillère fédérale Karin Keller-Sutter.

Bibliothèques et hôtels

La question des géants du Web n’est pas la seule à être controversée. Beaucoup de milieux ont réagi aux propositions faites par la commission. Les avis divergent sur les rémunérations que les bibliothèques d’utilité publique doivent verser ou non aux aux sociétés de gestion des droits d’auteur.

Idem de l’abolition, voulue par certains, de la redevance perçue pour l’utilisation des œuvres dans les espaces privés des hôtels, des logements de vacances, des hôpitaux et des prisons.

Compromis

Le Conseil national s’en était pour sa part tenu au compromis du groupe de travail. Les consommateurs qui téléchargent illégalement un film ne devraient pas être inquiétés.

Le téléchargement pour un usage privé sur un réseau pair à pair restera autorisé. L’accès à des sites illégaux ne serait pas bloqué. Le Conseil fédéral a privilégié l’autorégulation pour lutter contre la piraterie au niveau des hébergeurs de site.

Le projet prévoit par ailleurs une gestion collective facultative des droits, d’inspiration scandinave. Les sociétés de gestion des droits d’auteur pourront autoriser des utilisations de masse même sans disposer des droits de tous les titulaires. Ces derniers pourront toutefois exclure leurs oeuvres du système.

Les chercheurs pourront plus facilement analyser de gros volumes de données: les auteurs ne pourront plus interdire la confection automatique de copies nécessaires. L’utilisation d’oeuvres pour lesquelles les titulaires des droits sont introuvables sera plus aisée.

Il faudra en revanche l’autorisation du photographe pour télécharger une image de tiers: le droit d’auteur existant pour les oeuvres d’art sera étendu à toutes les photos. Comme dans l’UE, les musiciens verront leurs oeuvres protégées durant 70 ans au lieu de 50 ans.

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