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Syrie: pourparlers de Genève entre relance et risque d’enlisement

Staffan de Mistura a vanté les vertus du nouveau mécanisme technique sur la Syrie pour faire avancer les pourparlers de Genève. KEYSTONE/EPA AFP POOL/FABRICE COFFRINI / POOL sda-ats

(Keystone-ATS) Les pourparlers sur la Syrie à Genève sont entrés dans une phase bicéphale, entre discussion politique et un nouveau mécanisme technique. Au terme de quatre jours de réunion, l’émissaire de l’ONU assume ce choix qui doit aider les négociations sur le contenu.

Devant la presse, Staffan de Mistura a indiqué vendredi avoir senti auprès des parties le besoin d'”approfondir” le processus pour clarifier des questions légales et constitutionnelles. “Je pense que nous avons fait cela”, a-t-il ajouté. La veille, un nouveau format entre experts a débuté, et quatre réunions séparées ont eu lieu depuis. Ce dispositif sera maintenu lors du prochain tour, qui devrait avoir lieu “en juin”.

Aussi bien le gouvernement que le principal groupe d’opposition, le Haut Comité pour les négociations (HCN), ont fait preuve toutefois d’une tonalité moins enthousiaste sur ce processus. Chacune souhaitait affirmer de manière ferme que la Constitution doit être pilotée uniquement par des Syriens.

Pas de quoi inquiéter l’émissaire, qui constate que “le fait est” que le mécanisme “existe”. “Nous ne prévoyons pas ou n’avons pas pour objectif d’écrire un projet de nouvelle Constitution”, a-t-il tenu à clarifier. “Nous essayons de préparer le terrain pour que les Syriens le fassent”.

Assad plutôt pour Astana

Vendredi, le HCN s’est affiché moins offensif que la veille. Le dialogue avec l’émissaire ces derniers jours doit permettre “des résultats plus cruciaux” lors de la prochaine série, a dit le président de cette délégation Nasser al-Hariri.

Après avoir souhaité une série de discussions “plus ramassée” que les cinq précédentes pour un climat plus “proactif”, M. de Mistura aura préféré ralentir provisoirement le dialogue sur les quatre “paniers”. Mais ces questions d’un gouvernement de transition, d’une nouvelle Constitution, des élections contrôlées par l’ONU et de la lutte contre le terrorisme devraient à nouveau toutes être abordées lors du prochain tour.

Par ailleurs, l’environnement sur le terrain “n’est pas encore prêt pour la vraie discussion politique” qui résoudra le conflit entamé il y a plus de six ans, a également admis M. de Mistura. Mais les pourparlers actuels préparent cette étape.

L’émissaire va consulter en début de semaine prochaine le Conseil de sécurité. Il ne s’était pas fixé d’attentes avant d’entamer mardi ces quatre jours de pourparlers. D’autant plus que le président syrien Bachar al-Assad avait clairement affiché auparavant sa priorité pour le processus mené par ses alliés russe et iranien mais aussi par la Turquie à Astana, au Kazakhstan.

Millions de réfugiés

Ces trois pays ont conclu récemment un accord pour une désescalade entre gouvernement et rebelles dans quatre zones. Celles-ci doivent être doublées de zones d’exclusion aérienne.

De son côté, le HCN vise toute tentative qui viserait à délocaliser les discussions de Genève. “Nous voulons maintenir le processus politique ici” sous la responsabilité de l’ONU, a aussi expliqué M. al-Hariri. Et selon lui, ce scénario constitue la seule possibilité d’obtenir une transition politique.

Outre Astana, Moscou a renforcé son poids dans les pourparlers à Genève aussi. Le vice-ministre russe des Affaires étrangères Guennadi Gatilov a à nouveau rencontré les différents acteurs. Vendredi, il a participé par ailleurs à une discussion avec M. de Mistura et le représentant américain au groupe de travail sur la trêve en Syrie, Henry Ensher.

Cette réunion s’est tenue alors que l’armée américaine a mené jeudi une frappe aérienne contre des miliciens soutenus par le régime et l’Iran. Ces groupes étaient intervenus contre des rebelles appuyés par les Etats-Unis dans le sud du pays. Huit personnes ont été tuées, a expliqué l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH).

Syrie et Russie ont condamné ce bombardement. Au total, 13,5 millions de personnes ont besoin d’assistance en Syrie, où la Suisse a annoncé vendredi qu’elle allait ouvrir un bureau humanitaire, et 5 millions sont réfugiées dans les pays voisins. En six ans, le conflit a fait plus de 320’000 victimes.

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