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Les tensions Suisse-UE, source d’inquiétude pour la diaspora helvétique

Des gens assis dans une salle
Les délégués du Conseil des Suisses de l'étranger, réunis à Montreux, ont adopté une résolution demandant au Conseil fédéral de ne pas les oublier dans le cadre des discussions entre Berne et Bruxelles autour de l’accord cadre institutionnel. swissinfo.ch

Les Suisses de l’étranger veulent continuer à pouvoir s’établir et travailler librement en Europe. Leurs représentants, réunis cette fin de semaine à Montreux pour leur Congrès annuel, ont une nouvelle fois exprimé à haute voix leur attachement à l’accord sur la libre circulation des personnes.

Congrès annuel

Plus de 400 membres de la «Cinquième Suisse» se réunissent chaque année durant trois jours en Suisse pour leur congrès annuelLien externe. La manifestation commence traditionnellement par la séance du Conseil des Suisses de l’étranger, le «Parlement de la Cinquième Suisse», avant d’ouvrir officiellement le vendredi soir. La journée du samedi est consacrée à l’assemblée plénière ainsi qu’à la thématique officielle du congrès, cette année: «Quel monde pour demain?». La journée dominicale est l’occasion de visiter la région hôte.

Les délégués du Conseil des Suisses de l’étranger (CSE)Lien externe, le «Parlement» de la 5e Suisse, s’inquiètent de l’évolution des relations entre la Suisse et l’Union européenne. A la quasi unanimité des 98 délégués présents (97 voix pour et 1 abstention), ils ont adopté vendredi une résolution demandant au Conseil fédéral de ne pas les oublier dans le cadre des discussions en cours entre Berne et Bruxelles autour de l’accord cadre institutionnel (voir encadré à la fin de l’article).

Les Suisses de l’étranger exigent du gouvernement qu’il soumette dès que possible cet accord au Parlement afin de préserver une voie bilatérale qui a selon eux fait ses preuves. Ils craignent en particulier qu’un blocage prolongé ne mette à mal l’accord sur la libre circulation des personnes (ACLP)Lien externe. Pour les représentants de la diaspora, il ne fait aucun doute que les Suisses de l’étranger profitent directement des avantages de ce texte.

«Grâce à cette réglementation, ces personnes bénéficient de droits comme le droit au changement de domicile et le droit au changement d’activité lucrative au sein de l’Union européenne (mobilité géographique et professionnelle) ou à une égalité de traitement avec les citoyens des pays de l’UE dans divers domaines (mêmes conditions de travail, coordination des systèmes d’assurances sociales, mêmes prestations sociales, mêmes avantages fiscaux)», écrivent-ils dans leur résolution.

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60% de la diaspora concernée

L’Organisation des Suisses de l’étranger (OSE) a toujours soutenu avec vigueur la libre-circulation des personnes et a combattu ces dernières années toutes les attaques – la plupart issues des rangs de l’Union démocratique du centre (UDC, droite souverainiste) – qui s’en prenaient directement ou indirectement à l’accord signé en 1999 par Berne et Bruxelles.  

Pour comprendre cet engagement sans failles, il suffit de jeter un coup d’œil aux statistiques: sur les 760’000 Suisses ayant élu domicile hors de leur patrie d’origine fin 2018, plus de 60% (458’000) vivaient dans un pays européen. Par ailleurs, trois quarts des citoyens suisses établis à l’étranger ont entre 18 et 65 ans et sont donc potentiellement actifs sur le plan professionnel.

Ils sont également de plus en plus nombreux à quitter leur pays à plusieurs reprises au cours d’une carrière, rendant la liberté de mouvement et d’établissement toujours plus vitale au sein de l’espace européen. «Tous les jours, en allumant la BBC, je vois comment le manque d’intelligence d’un gouvernement peut mener un pays à la catastrophe», a par exemple souligné Vincent Croset, député des Suisses de Grande-Bretagne, en faisant référence aux difficultés engendrées par le «Brexit».

Initiative de l’UDC

Une menace plus directe encore plane sur la libre circulation des personnes. Avec son initiative dite «pour une immigration modérée»Lien externe, l’UDC s’en prend une nouvelle fois directement à la liberté de mouvement des travailleurs entre la Suisse et l’Union européenne. Déposé l’été dernier, le texte exige que la Suisse règle de manière autonome l’immigration des étrangers.

Si l’initiative était acceptée par le peuple, les autorités auraient un an pour négocier la fin de l’accord sur la libre circulation avec Bruxelles. Faute de solution dans ce délai, le Conseil fédéral devrait dénoncer l’accord dans le mois qui suit. La votation devrait avoir lieu en 2020. A n’en pas douter, les représentants de l’OSE se battront une nouvelle fois corps et âme pour empêcher son acceptation.

Accord-cadre: un état des lieux

Le Conseil fédéral se trouve actuellement entre le marteau et l’enclume: d’un côté, les pressions de l’UE et, de l’autre, le risque d’un rejet de l’accord-cadre par le Parlement ou le peuple, dans le cas où le texte définitif ne parviendrait pas à obtenir le soutien d’une majorité entre les forces du centre et de gauche.

Le gouvernement essaie donc de gagner du temps, en expliquant l’importance de l’accord et en tentant d’atténuer les résistances. Le 7 juin, il a finalement adressé une lettre au président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, dans laquelle il a clairement reconnu qu’il ne serait pas possible de «réunir une majorité» en Suisse en faveur de l’accord sans clarifier ou réviser trois points importants: la protection des salaires, les aides d’Etat et la directive européenne sur la citoyenneté.

Mécontente de l’attentisme du gouvernement helvétique, l’UE a pris des mesures de rétorsion économiques à l’égard de la Suisse. Début juillet, elle a ainsi décidé de ne pas reconduire l’équivalence boursière, temporairement accordée à la Suisse jusqu’à fin juin.  

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