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Climat: transformations “sans précédent” pour rester à +1,5 degré

La hausse des températures de 1,5 degré risque d'être atteinte en 2030 déjà (archives). KEYSTONE/AP/MARTIN MEISSNER sda-ats

(Keystone-ATS) Le monde doit engager des transitions “rapides” et “sans précédent”, s’il veut limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré, affirment les experts du GIEC. Si le réchauffement continue au rythme actuel, la hausse atteindra 1,5 degré entre 2030 et 2052 déjà.

Dans un rapport de 400 pages, dont le “résumé est publié lundi, les scientifiques exposent les nombreux impacts déjà à l’oeuvre, et notamment la menace d’emballement au-delà de 1,5 degré Celsius de réchauffement par rapport aux niveaux préindustriels: vagues de chaleur, extinctions d’espèces, ou déstabilisation des calottes polaires, source de montée des océans sur le long terme.

Les experts du GIEC observent qu’une augmentation de 1,5 degré comporterait déjà des risques pour la nature et pour l’humanité. “Chaque petit accès de réchauffement supplémentaire compte, d’autant que passer 1,5 degré accroît le risque de changements profonds, voire irréversibles, comme la perte de certains écosystèmes”, explique Hans-Otto Pörtner, coprésident de cette session du GIEC, qui a réuni chercheurs et représentants des Etats toute la semaine dernière à Incheon, en Corée du sud.

Emissions de CO2 à faire chuter

Si le mercure continue de grimper au rythme actuel, sous l’effet des émissions de gaz à effet de serre, il devrait atteindre +1,5 degré entre 2030 et 2052, note le rapport, basé sur plus de 6000 études. Et si les Etats s’en tiennent à leurs engagements de réduction d’émissions pris dans le cadre de l’accord de Paris en 2015 (COP21), ce sera 3 degrés à la fin du siècle.

Tenir les 1,5 degré requerrait que les émissions mondiales nettes de dioxyde de carbone d’origine humaine chutent de 45% environ en 2030 par rapport à 2010, puis tombent à “zéro net” d’ici 2050 (ce qui impliquerait que tout rejet de CO2 devrait alors être compensé par une destruction du CO2 dans l’atmosphère), explique le GIEC.

Villes, industries, énergie, bâtiment: tous les secteurs sont appelés à s’atteler à de “profondes réductions d’émissions”. Rester à 1,5 degré demandera “une transition rapide et de grande portée”, d’une ampleur “sans précédent”, écrivent les scientifiques.

Charbon, gaz et pétrole pointés

Le GIEC insiste sur l’énergie – charbon, gaz, pétrole étant responsables des trois quarts des émissions. Il propose plusieurs scénarios chiffrés incluant différentes combinaisons d’actions.

Ainsi, les énergies renouvelables, qui représentent aujourd’hui 25% environ de la production d’électricité, devront monter à 70-85% d’ici 2050. Il faudra aussi compter sur les techniques de capture et de stockage du carbone (CSC).

Mais le rapport souligne que l’efficacité de ces mesures, comme la plantation de forêts – qui gardent le carbone via la photosynthèse – ou l’utilisation de biomasse n’est pas établie et que ces mesures comportent des risques.

“Le rapport donne aux décideurs politiques l’information dont ils ont besoin pour prendre des mesures pour lutter contre le changement climatique tout en considérant aussi les besoins des populations”, explique la Sud-Africaine Debra Roberts, autre coprésidente de la réunion d’Incheon. “Les années à venir seront les plus déterminantes de notre histoire”, estime-t-elle.

Pas condamné à +3 degrés

Pour sa collègue française, la climatologue Valérie Masson-Delmotte, également à Incheon, “la bonne nouvelle est qu’il y a des actions en cours dans le monde, mais il faudrait les accélérer pour avoir des transitions douces. La vraie question de la faisabilité, c’est celle-là: les gens sont-ils prêts à agir? Et y aura-t-il assez de volonté politique collective?”

“Nous ne sommes pas condamnés à 3 degrés”, s’anime le climatologue Myles Allen. “Nous sommes éventuellement liés par nos actions passées, mais pour l’avenir tout est possible”, dit l’universitaire britannique qui espère entendre le secteur pétrolier.

Le rapport, commandé lors de la COP21 qui s’est tenue fin 2015 à Paris, a été finalisé la semaine dernière à Incheon, en Corée du Sud. Il doit accompagner la mise en oeuvre de l’accord de Paris sur le climat, qui engage les pays signataires à maintenir l’augmentation des températures moyennes d’ici à la fin du siècle “bien en dessous” de 2 degrés par rapport aux niveaux préindustriels, et à poursuivre l’action menée pour limiter cette progression à 1,5 degré.

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